L’Afrique : les défis du développement ; Entrée dans le thème par une étude de cas sur le Sahara.

Fichiers

 

 

 

« L’Afrique : les défis du développement »

 

 

 

 


Eduscol :

« L’Afrique : les défis du développement » est l’une des trois questions à traiter dans le thème 3 « Dynamiques géographiques de grandes  aires continentales », auquel le programme préconise  de consacrer 29  à  31 heures au total ; le professeur peut construire son projet sur la base de 9 heures environ ».
Cette étude consacrée à l’Afrique suppose une prise en compte globale de la notion de développement ; celle-ci, largement renouvelée en particulier dans le sens du développement durable, ne peut plus se limiter aux seuls indicateurs économiques et financiers (PNB, PNB/habitant, dette, etc.), ni même aux composantes du développement humain ; elle doit aussi intégrer la  dimension environnementale.
Elle interroge également la place du continent face à la mondialisation  et  suppose,  en examinant les capacités de réaction, les adaptations et les  dynamiques en œuvre,  de dépasser le constat d’une Afrique subissant dans la passivité les effets de la mondialisation.
 
Remarques :
Le continent africain a été peu exploré jusque-là par les programmes de lycée. Le programme précédant demandait d’étudier les villes africaines, mais dans l’actuel seuls les pays riverains de la Méditerranée sont abordés.
- Pourquoi faire de l’Afrique un objet d’études, dans le cadre des grandes aires continentales ? Comme le souligne S. Brunel dans un doc photo, « l’Afrique s’identifie pour le plus grand nombre au malheur et à l’échec. Guerre, sècheresse, maladie, pauvreté, enfants qui meurent de faim et qu’il faut aider ».
- Mais la vision de ce continent doit évoluer.
La diversité marque le continent : milieux naturels, niveaux de développement économique.
C’est aujourd’hui un espace géographique qui participe à l’économie-monde, reliée par des flux divers aux autres régions du monde. L’Afrique n’est pas marginalisée : on assiste à un développement très important des échanges avec l’Asie (Chinafrique…), développement des NTIC …
L’Afrique souffre d’une « crise de l’Etat », qui a marqué notamment la « décennie du chaos », dans les années 1990. Mais les revendications démocratiques se multiplient avec le développement de classes moyennes, de l’urbanisation, même si en même temps des Etats autoritaires et souvent corrompus résistent, et même si les inégalités sociales et spatiales se creusent à toutes les échelles.
- Elle insiste sur l’émergence d’une nouvelle Afrique.
Un espace à prendre en compte, car des menaces pour la sécurité collective y sont présentes: développement des trafics illicites qui alimentent des organisations criminelles, développement du terrorisme dans des territoires laissés à l’abandon par des Etats qui s’effondrent.
La richesse en ressources naturelles de ce continent suscite des convoitises grandissantes, notamment des pays émergents qui exercent une forte pression sur les marchés des produits énergétiques et miniers. 30% des richesses minières de la planète se trouveraient sur ce continent.  
Des marchés émergent, lentement certes, mais qui constituent des opportunités économiques : un marché à ne pas négliger et en croissance. La population africaine s’élève à  plus d’un milliard d’habitants et devrait atteindre 1,700 milliard en 2050. Le défi humain est un des défis majeurs pour ce continent. Les taux de croissance des PIB augmentent régulièrement.

Voir La Documentation Photographique Sylvie Brunel, dossier n° 8048, 2005, et L'Afrique, un Continent en réserve de développement, Sylvie Brunel, Bréal, 2010.

 

 

Entrée dans le thème par une étude de cas sur le Sahara.

 

Pour traiter ce thème de l’Afrique face aux défis du développement, l’entrée se fait par une étude de cas sur le Sahara, à laquelle on peut consacrer 3 heures: « le Sahara : ressources conflits ».
 
Elle permet d’illustrer plusieurs problématiques :
- la richesse en ressources naturelles, qui sont exploitées, convoitées, qui sont un atout pour le développement, et qui font participer l’Afrique à l’économie-monde ; les préoccupations de développement durable apparaissent également,
- la diversité  des niveaux de développement (contrastes entre Etats du Nord et Sud du Sahara)
- la crise de l’Etat,
- et les menaces qui pèsent sur la sécurité collective : ces deux derniers points sont des défis à relever, et intéressent aussi la communauté internationale
 
Eduscol :
- Quels sont les enjeux économiques et géopolitiques de l’ensemble saharien  au regard des ressources qu’il recèle ?  Quelles sont les multiples convoitises  qui s’y manifestent ?
Cette étude de cas doit être traitée en 3 heures environ.
Elle permet de mettre à jour les enjeux actuels du développement et de l’insertion de l’espace saharien dans la mondialisation. Constituant l’entrée dans la question consacrée à l’Afrique, il est impératif de la placer en tête.
Elle peut se conduire selon quelques axes de lecture :
            - un espace de fortes contraintes physiques, mais disposant de ressources.  Le nom même, al-sahrà (désert), de cet immense espace (8,5 millions de km²) dont les limites peuvent varier selon les critères retenus, suggère la contrainte radicale de l’aridité à laquelle s’ajoutent de forts contrastes thermiques. Le Sahara, peu peuplé hormis le couloir du Nil,  dispose de ressources, principalement souterraines (phosphates, hydrocarbures, nappes aquifères fossiles) ; il est aussi propice  à un tourisme d’aventure contrarié par une insécurité  endémique ;  et l’uranium ?
            - un ensemble politiquement  fractionné. Le découpage frontalier, aujourd’hui assumé par les États africains, est toutefois source de contestations par les populations locales (fédération touareg), de revendications territoriales (Sahara occidental), de conflits et de mouvements de populations réfugiées. Pour les Etats du Maghreb ou du Makrech tournés vers la Méditerranée,  les territoires sahariens constituent des arrières pays en voie d’intégration ; pour plusieurs des États saharo-sahéliens (Mali, Niger, Tchad, Soudan),  l’enclavement s’ajoute à l’aridité ; 
            - un espace convoité. Les enjeux  géopolitiques et économiques des espaces sahariens suscitent de nombreuses convoitises entre de multiples acteurs internes à l’Afrique ou extérieurs : zones d’influence, contrôles de territoires, exploitation de ressources  (pétrole, uranium, par exemple). Ces convoitises se manifestent dans les investissements en provenance, le plus souvent,  d’autres parties du monde, et s’expriment, entre autres,  dans des conflits  intra et interétatiques dont les populations  subissent les effets,  conjugués à ceux de la mal gouvernance.
Les acquis de cette étude seront synthétisés sous la forme d’un croquis.

 

Le Sahara : ressources conflits :

« Depuis une dizaine d’années, on assiste à un retour du Sahara sur la scène politique internationale et médiatique. Cette immense étendue désertique traverse en effet une période agitée en raison de l’installation de groupes terroristes islamistes sur son sol, du développement de trafics en tous genres (…), de l’immigration de clandestine de Subsahariens (…) et enfin de la compétition engagée entre les pays du Nord et émergents pour s’approprier ses richesses minières et pétrolières ».

«  Géopolitique du Sahara », Revue Hérodote n°142, 3ème trimestre 2011.  

 

Les ressources naturelles sont abondantes et diverses au Sahara comme sur l’ensemble du continent africain. Elles sont à l’heure actuelle diversement mises en valeur : certaines sont exploitées, d’autres sont en réserve. Ces ressources peuvent être une source de richesses favorables au développement des pays qui les possèdent. Mais il faut pour cela qu’elles puissent être mises en valeur, que les revenus profitent aux Etats et aux populations (que les revenus ne partent pas à l’étranger et qu’elles ne soient pas détournées pas les classes dirigeantes, que leur exploitation rentre dans une logique de développement durable).

Problématiques :
- Quelles ressources sont présentes au Sahara ? Eventuellement, pourquoi n’ont-elles pas été exploitées jusque-là : quels obstacles existent à cette mise en valeur ?
- Dans un contexte de mondialisation, quels enjeux existent autour de la mise en valeur de ces ressources, qui sont l’objet d’âpres compétitions, à différentes échelles ?
- Le contrôle, la maîtrise de ces ressources est-il le seul enjeu présent au Sahara ? Quels autres facteurs expliquent le retour du Sahara sur la scène politique internationale et médiatique et interfèrent avec le développement de cet ensemble géographique ?

Comment entrer dans ce sujet ?

- Une première possibilité pourrait être de rentrer par un état des lieux des ressources afin de familiariser les élèves avec un espace peu connu. Identifier, localiser, les principales ressources, questionner les conditions de leur mise en valeur. L’organisation et la synthétisation des réponses se ferait sous forme d’un tableau à double entrée et d’une première étape dans la réalisation du croquis (voir fiches de travail en annexes).
- Une seconde possibilité, en fonction de l’actualité récente, pourrait être un focus sur le Mali.
 
C’est cette seconde option qui est présentée ici, et qui va s’efforcer de mettre en évidence les enjeux géopolitiques dans cette région.

 

 

Première partie de l’étude : le Mali, révélateur des enjeux géopolitiques de l’espace saharien.

 

Pourquoi s’intéresser à ce pays ?

Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) détient six Français. Quatre d'entre eux, des employés du groupe nucléaire public Areva et de son sous-traitant Satom, ont été enlevés le 16 septembre 2010 à Arlit dans le nord du Niger, avec trois autres personnes, libérées depuis. Deux autres ont été kidnappés le 24 novembre 2011 par des hommes armés dans leur hôtel à Hombori, dans le nord du Mali, et emmenés vers une destination inconnue. Des djihadistes "afghans et pakistanais" présents dans le nord du Mali.
Dans son entretien sur la chaîne France 24, le président nigérien a affirmé que des djihadistes "afghans et pakistanais" étaient présents dans le nord du Mali et officiaient comme "formateurs" dans des camps d'entraînement. Il a ajouté avoir des "informations précises sur des camps d'entraînement [du groupe islamiste] Boko Haram à Gao".
"Au Nord-Mali, les forces dominantes sont les djihadistes et les narcotrafiquants. Tout cela est coordonné : cela va du Sahara jusqu'en Somalie, a affirmé Mahamadou Issoufou. Je crois que toutes ces organisations coopèrent entre elles, que ce soit les Chabab en Somalie, Boko Haram au Nigeria, AQMI [Al-Qaida au Maghreb islamique] en Algérie et au Sahel en général, jusqu'en Afghanistan. [...] Notre préoccupation, c'est que le Sahel ne se transforme pas en un nouvel Afghanistan."
« Les otages français au Sahel sont "en bonne santé" », site du Monde, le 7 juin 2012

 

 

Des événements récents ont porté sur le devant de la scène Le Mali, Etat parmi les plus pauvres du monde, avec la proclamation d’indépendance du Nord du pays, l’Azawad.
C’est un facteur de déstabilisation de l’ensemble de région, par la remise en question de frontières issues de la colonisation qui avaient été reconnues intangibles en 1964 par l’OUA (Organisation de l’Unité Africaine).
Un autre danger qu’illustre la situation de ce pays est la montée du fondamentalisme religieux, avec la création d’AQMI en 2007 (Al Qaida pour le Maghreb islamique). AQMI, héritière du FIS (Front Islamique du Salut)  s’est propagée à partir de son pays d’origine, l’Algérie, vers le Sahara central, et s’enracine aussi dans d’autres pays du Maghreb. Le Nord du Mali est devenu le sanctuaire d’AQMI et la région où sont certainement retenus les otages occidentaux.
Le président du Niger, pays voisin qui craint pour la sécurité de son pays mais aussi pour toute la zone géographique du Sahara et au-delà, emploie le néologisme d’ "Africanistan" pour résumer les événements et faire part de ses inquiétudes.
C’est déjà un drame humain : des dizaines de milliers de réfugiés ont quitté la région depuis le début de la crise.
Ces menaces, et l’insécurité qui en découle, rendent problématiques la mise en valeur des ressources naturelles. En septembre 2010 des employés d’Areva ont été enlevés à Arlit dans le Nord du Niger, qui est la principale région d’approvisionnement en uranium de cette société. Le renforcement du terrorisme est une menace sur la sécurité énergétique de la France.
Un projet de gazoduc transsaharien, qui devrait permettre l’exportation du gaz du Nigéria vers l’Europe, est à l’étude. C’est un projet qui permettrait aux pays européens de diversifier leurs sources d’approvisionnement (alors que certains gisements commencent à s’épuiser, et être moins dépendants du gaz russe). Mais le coût de réalisation est très élevé et il faut éviter qu’il traverse des régions peu sûres ou en guerre.

 

 

1. Pour rentrer dans le sujet avec les élèves :

 

 
Problématique : en quoi la situation de ce pays est révélatrice des enjeux du Sahara ?

(Réponses attendues en italique)

- Date de l’indépendance ? Ancienne métropole ? Capitale ? 

- Quelles caractéristiques géographiques du Mali apparaissent dans les documents 1, 2 et 3 ?

- un pays parmi les plus pauvres du monde : 0.35 d’IDH, c’est un PMA, 175 ème rang mondial. Fort taux de fécondité, espérance de vie courte. Plus de la moitié de la population vit avec moins d’1 euro par jour.
- deux ensembles régionaux : au Nord, une région s’étendant sur une partie du Sahara ; très faiblement peuplée : 66% du territoire mais 9% de la population ; 1 à 5 hab. /km2. Dont des Touaregs.
Au Sud, une région plus peuplée en milieu sahélien, un peu plus arrosée.
 

- De quelles ressources naturelles dispose le Mali ? Où sont-elles situées ? (doc. 2)

- or au NE ;  gisement d’hydrocarbures de Taoudéni au NO non encore exploité, mais qualifié de prometteur, « nouvel eldorado » ?

- Qui est intéressé par l’exploitation des gisements d’hydrocarbures du NO, mais pourquoi ne sont-ils pas mis en valeur pour le moment ? Doc. 7

- Les Etats voisins du Mali : Algérie et Mauritanie. Mais aussi des FMN ou sociétés nationales d’autres Etats : Total (France), ENI (Italie) etc…
- Obstacles à la mise en valeur : le coût (nécessité de sondages, de forages) ; l’enclavement de la région : il faudra acheminer le pétrole brut vers des ports (ce qui suppose des infrastructures de transport : conduites…).
NB : l’Etat Malien n’ pas les moyens financiers de lancer ces campagnes d’exploration puis d’exploitation. Il est dépendant des investissements étrangers.

- Quel événement a eu lieu en avril 2012 ?  (doc. 6 et Introduction doc. 7)

- Déclaration d’indépendance de l’Azawad par le MNLA (Mouvement National de Libération de L'Azawad) :
(Azawad est un mot d'origine tamasheq qui signifie littéralement « le territoire de transhumance » ou « la terre de transhumance »).

 

 

Correction en classe et poursuite du travail

Cet ensemble documentaire doit permettre de trouver quelques origines de cette crise politique, et mettre en évidence certains enjeux géopolitiques de l’espace saharien.

 

- Quel déséquilibre régional apparaît dans le doc 4 ? Comment expliquer qu’il se soit aggravé ?

- Le pays a connu une amélioration de sa situation économique mais qui a profité essentiellement au Sud du pays, plus densément peuplé, aux conditions naturelles plus favorables et proches de la capitale. Au nord, « le niveau de vie des populations concernées tend à stagner, voire à se dégrader et … le maillage des services publics (santé, éducation, etc.) y est particulièrement mince » : des populations, touchées aussi par l’accentuation de la sècheresse, et qui ont le sentiment d’être délaissées. Des promesses faites aux populations touarègues qui s’étaient déjà soulevées non tenues.
- Insuffisance, inefficacité des politiques de développement.
- La dégradation des conditions de vie de la population explique en partie la nouvelle rébellion des Touaregs.

 

- Pourquoi la situation du Nord Mali est-elle inquiétante pour les pays voisins mais aussi pour la communauté internationale ? Doc. 5 et 6.

- Présence de mouvements rebelles et extrémistes : rébellion touarègue, AQMI
- sur la route de tous les trafics illicites : drogue, armes…
- le problème des frontières : pourquoi la reconnaissance de l’Indépendance de l’Azawad présente des risques de déstabilisation pour tout le Sahara ? « A l’indépendance, l’ensemble des pays africains, sous l’égide de l’Organisation de l’Unité Africaine  s’est mis d’accord, dès 1964, pour reconnaitre un principe, de caractère dogmatique, l’intangibilité des frontières issues de la colonisation, fixées pour l’essentiel à Berlin en 1885. Non parce qu’elles étaient pertinentes, ce qui était rarement le cas, mais parce que toute autre solution aurait entrainé de multiples guerres ».

 

Conclusion :

- Pb du développement : Un Etat très pauvre, confronté à une croissance démographique explosive, dont le développement pourrait profiter de la présence de ressources naturelles mais qu’il est incapable de mettre en valeur … (coût, enclavement, conditions d’exploitation) : il est dépendant des FMN étrangères et de la conjoncture internationale (cours des matières premières).

- Le manque d’Etat : Manque de moyens financiers – mais aussi problème de la corruption -, Etat contraint par des politiques d’ajustement structurel, et incapable s’assurer ses fonctions régaliennes en raison de la faiblesse du pouvoir (instabilité politique en dépit des progrès de la démocratie, des politiques d’aménagement et de développement du territoire inadaptées, inefficaces), de sorte que des régions échappent à son contrôle. Cela favorise l’insécurité, les trafics en tous genres : ceux-ci alimentent des réseaux criminels, terroristes mais assurent aussi la survie de certaines populations.

- Une situation explosive : la très grande pauvreté d’une partie de la population qui se sent délaissée, dont la situation s’est dégradée pour diverses raisons (sècheresse, déshérence des services publics) le manque de contrôle sur le territoire, renforcent les tendances sécessionnistes : proclamation de l’indépendance de l’Azawad par le MNLA. Une crise qui a des répercussions internationales : à l’échelle régionale du Sahara (craintes de l’Algérie où vivent aussi des Touaregs), Niger ; à l’échelle mondiale : nord Mali devenu un des sanctuaires du terrorisme islamique, avec AQMI.

La déstabilisation de cet Etat, et du Sahara en général, fait planer des menaces sur l’exploitation des ressources naturelles, dont les marchés sont sous tension, en raison d’une demande croissante liée au développement des pays émergents.

 

NB : dans l’ensemble documentaire pourraient être ajoutés :
- une carte des conflits du Sahara : en effet la crise malienne n’est qu’un révélateur des tensions que connaît l’espace saharien ;
- un court texte sur les relations difficiles entre le Maroc et l’Algérie : les puissances régionales ne sont pas capables de résoudre cette nouvelle crise ; et si elle puise ses racines dans de vieux conflits elle révèle aussi de nouvelles menaces.
 

 

2. Pour approfondir :

 

Le Sahara : un espace fractionné, aux enjeux géopolitiques et économique complexes.

Des conflits anciens n’ont pas été réglés au Sahara et aujourd’hui de nouvelles menaces apparaissent.

 

A) Des conflits de plus en plus complexes

De multiples conflits se chevauchent et s’aggravent d’eux-mêmes.

 

1) La question du Mali : un problème ancien, mais aux dimensions nouvelles:

-  Le problème des Touaregs.
Après l’indépendance en 1960, le Mali n’a pas prêté suffisamment attention au Nord du pays, dont les populations se sont senties abandonnées. La 1ère rébellion des Touaregs date de 1962 et a été un échec. La 2ème intervient au début des années 1990 et a conduit à la signature d’accords  (Accords de Tamanrasset en 1991, Pacte National de 1992) dans lesquels l’Etat du Mali s’engageait d’assurer le développement du Nord, d’intégrer des Touaregs dans l’armée malienne et la fonction publique. Des accords signés grâce à l’intermédiaire de la Libye de Khadafi et de l’Algérie.
Le conflit a ressurgi en 2006.

 

- Changement de dimension : l’entrée en jeu d’Al Qaida

-  Des mouvements islamistes fondamentalistes en Algérie et AQMI.
AQMI est l’héritière du FIS, devenu GIA (Groupe Islamique de combat) dont une branche le GSPC (Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat) s’est transformé en l’AQMI actuel. Cette organisation a attiré l’attention internationale en prenant par aux trafics de drogues, de cigarettes, d’armes et en prenant des otages, ce qui constitue aussi une source importante de revenus.

 

- Quelles relations entre AQMI et Al Qaida ?
D’une part AQMI n’apparaît pas comme une organisation terroriste hiérarchisée, comme Al Qaida, ni un groupe homogène. Plusieurs chefs d’unités se disputent le pouvoir. D’autre part pendant longtemps on ne pouvait pas savoir quels liens existaient avec Al Qaida. AQMI apparaissait plus comme une organisation criminelle utilisant l’étiquette  Al Qaida pour ses opérations, ce qui attirait l’attention de la communauté internationale. En 2010 une vidéo de Ben Laden approuvant l’enlèvement d’otages ai Niger à l’automne 2010 et la revendication commue du retrait des troupes françaises d’Afghanistan a révélé ces liens.

 

- La propagation d’AQMI dans la région.
AQMI se propage à partir de son pays d’origine, l’Algérie, vers le Sahara central, et s’enracine aussi dans d’autres pays du Maghreb.
Le Maroc et la Mauritanie ont du s’impliquer dans la lutte contre AQMI à la suite de la découverte d’arsenaux sur leurs territoires, d’enlèvements d’étrangers sur leur sol ou d’attaques contre l’armée (Mauritanie).
AQMI au moment des printemps arabes a fait des déclarations de soutien aux mouvements de révolte, recherchant par là un soutien populaire, sans résultats pour le moment.
En Libye, les rebelles se sont clairement dissociés d’AQMI mais cette organisation a eu accès à des stocks d’armes qui ont été transportées dans la région du Sahara central.
Au Mali : AQMI a choisi le Nord du pays comme refuge, profitant de la faiblesse de l’Etat et de l’armée (8000 hommes seulement et risques politiques d’une intervention au nord), en particulier face aux rébellions touarègues. Elle peut aussi espérer profiter du malaise social, du manque de perspectives économiques, du chômage élevé chez les jeunes pour prospérer : ce sont des terreaux fertiles pour le fondamentalisme religieux.

 

2) Les difficultés d’interventions et de règlement par les puissances régionales :

Le Mali n’est pas le seul pays concerné par cette crise :
- car le peuplement Touareg s’étend sur plusieurs Etats qui peuvent aussi craindre la sécession, même si le MNLA a dans un premier temps parlé de l’intangibilité des frontières et même si les populations Touarègues sont mieux intégrées en Libye ou en Algérie.
- car la zone d’action d’AQMI s’étend sur tout le Sahara central et elle n’hésite pas à commettre des attentats et des enlèvements dans tous les pays du Sahara.

 

Mais des tensions préexistantes gênent la résolution de  ce nouveau conflit :

- la question non résolue du Sahara occidental sape la coopération régionale entre Maroc et Algérie qui refusent de participer ensemble aux réunions régionales de haut niveau. Elle serait pourtant indispensable dans ce nouveau conflit.
(Le Sahara occidental est divisé en une partie occidentale contrôlée par le Maroc et une partie méridionale et orientale plus petite contrôlée par le Polisario (organisation militaire et politique qui revendique l’indépendance  du Sud-Maroc) soutenu par l’Algérie. Le conflit a commencé au milieu des années 1970 et est marqué par des heurts violents entre l’armée marocaine et le Polisario.
 
- L’Algérie apparaît depuis la chute du régime libyen comme la principale puissance régionale du Sahara.
L’Algérie, le Mali, la Mauritanie et le Niger ont créé un commandement anti-terroriste commun à Tamanrasset au sud de l’Algérie. Cependant le Maroc et la Lybie n’en font pas partie.
Accord aussi entre Mali et Niger pour renforcer la collaboration entre leurs armées et sécuriser leur frontière commune.
L’Algérie n’a-t-elle pas intérêt à ce que l’insécurité se maintienne pour que le gouvernement continue de recevoir l’appui politique et militaire des Etats-Unis ? Cela lui permet aussi de conserver sa place de puissance régionale, alors qu’elle ne souhaite pas de présence occidentale dans la région. A-t-elle des visées sur l’exploitation du pétrole malien ? 
 

 

B) Les conflits se nourrissent de tous les trafics qui traversent l’Afrique occidentale :

 

1) Une région au centre de ces flux :
- Trafic de drogue : en provenance des cartels d’Amérique latine et à destination de l’Europe.
- Trafic d’armes : en provenance du Soudan et plus récemment de Libye.
- Routes de migrations clandestines.

 

2) Des trafics qui déstabilisent toute la région:
Rôle majeur tenu par le trafic de stupéfiants (cocaïne) : le développement de ce trafic va de pair avec le développement de la circulation d’armes. Il génère des profits rapides dont se servent les organisations terroristes.
Ils impliquent parfois des responsables politiques, des services de sécurité.
Les Etats, parfois, laissent faire : cela génère des revenus. Cela peut être utilisé comme « moyen de régulation interne » : au Nord Mali le gouvernement a laissé faire car le trafic était aux mains de groupes opposés aux Touaregs…

 

 

C) L’engagement accru des acteurs internationaux en quête de ressources naturelles 

 

1. Comment expliquer l’intérêt porté à la sécurité de cette région ?
Certes les différents trafics affectent EU et UE.
Mais la recherche des ressources naturelles est l’autre raison majeure de cet engagement. L’Afrique devient une source importante de gaz et de pétrole pour l’Europe qui se préoccupe de sa trop grande dépendance de la Russie ; idem pour le EU qui comptent de plus en plus sur le pétrole importé d’Afrique.
Un projet de gazoduc transsaharien est envisagé ; infaisable économiquement pour le moment, mais il nécessite que la sécurité soit rétablie au Sahara.
Les puissances émergentes du BRIC notamment s’intéressent de plus en plus à l’Afrique et au Sahara et investissent dans l’exploitation des ressources naturelles. La « Françafrique » remplacée par la « Chinafrique » ?

 

2. La France :
Elle a déclaré qu’elle intensifierait l’appui militaire aux gouvernements de la région et dispose de plusieurs bases militaires. (Paris dispose encore de 9 000 hommes sur place, stationnés en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Gabon, en Centrafrique, au Tchad et à Djibouti).

 

3. Les Etats-Unis :
Les Etats-Unis redécouvrent l’Afrique et décident qu’une partie de leur indépendance stratégique va s’y jouer dans les décennies avenir.
Ils ont créé un commandement de combat américain pour l’Afrique : l’Africom. Il a été inauguré par l’administration W. Bush à la fin de son mandat. L’annonce de ce dispositif a suscité une forte résistance en Afrique et aucun État n’a accepté d’héberger le commandement général, lequel s’est en définitive installé en Allemagne (Stuttgart) et en Italie.
La montée en puissance de l’Africom devrait s’articuler autour de la base US de Djibouti
Les EU apportent leur aide aux gouvernements pour améliorer les renseignements, pour former des hommes à la lutte anti-terroriste et pour organiser des opérations et exercices conjoints (exercice Flintlock au printemps 2010) contre les terroristes. Ils sont présents au Mali depuis 2001 avec un centre de formation pour l’armée malienne dans la région nord de Gao et fournissent du matériel ainsi que la France.
 


En 2011, l’OTAN a envahit la Libye « Bab el Africa » (porte de l’Afrique), notamment avec l’intention d’y installer à terme la base principale de l’Africom.)

Cet accroissement des intérêts américains dans cette région est la conjonction de plusieurs facteurs.
Le premier est relatif à l’élaboration d’une politique africaine des Etats-Unis à dominance économique, initiée sous l’administration Clinton dès 1993. Celle–ci est activement poursuivie par l’administration G. W. Bush dès janvier 2001.
Le deuxième concerne les attentats du 11 septembre 2001 ; ils ont révélé aux Etats-Unis leur important degré de dépendance énergétique vis-à-vis d’un Moyen Orient hostile.
Le troisième porte sur le réexamen de la politique énergétique américaine. Il a conduit Washington à faire de l’Afrique noire son allié de revers dans sa relation avec ses partenaires du Moyen-Orient. Avec cette mutation, l’Afrique gagne en importance stratégique dans la sécurité des Etats-Unis. En effet, désormais, une partie de leur sécurité s’y joue.
Le quatrième facteur concerne l’incapacité structurelle des partenaires africains des Etats-Unis à assurer efficacement la sécurité sur le continent. Leurs lacunes en matière sécuritaire étant connues, les intérêts américains y sont plus exposés qu’ailleurs.
C’est donc en combinant ces quatre facteurs avec la menace terroriste qui plane sur leurs intérêts en Afrique depuis 1998, que les Etats-Unis ont décidé de la création d’Africom. (…)
 
Africom est un commandement combattant du terrorisme qui se camouffle dans les questions humanitaires, le développement et la prévention des conflits en Afrique. Sa vocation est la lutte préventive et active contre le terrorisme dont la menace contre les intérêts américains en Afrique est une réalité. A travers ses intenses activités de renseignement, Africom est aussi un outil stratégico–militaire. Sous cet angle, il est au service des intérêts américains, notamment économiques, qu’il doit protéger voire défendre contre, non seulement les terroristes, mais aussi contre toute concurrence. Africom est en somme un instrument de guerre anti-terroriste et de guerre économique spécieusement présenté aux Africains comme un catalyseur de développement. S’il peut effectivement concourir au développement du continent, force est de reconnaitre qu’il n’a pas été pensé puis créé à cette fin altruiste. L’importance des moyens financiers, matériels et humains qu’il mobilise démontre sa dimension stratégique pour les Etats-Unis.
Les Etats-Unis rappellent en permanence qu’Africom repose sur une concertation permanente avec leurs partenaires africains. Ce rappel fait abstraction des réticences de l’UA et des polémiques suscitées dans l’opinion africaine par l’annonce de la création de ce commandement.
AFRICOM : Le commandement militaire américain pour l’Afrique  Par Alain FOGUE TEDOM*, le 21 novembre 2011

 

 

Seconde partie de l’étude : des ressources variées, abondantes ou prometteuses, qui pourraient permettre le développement :

 

 

1. Pour rentrer dans le sujet avec les élèves :
 
Identifier, localiser, les principales ressources, questionner les conditions de leur mise en valeur. L’organisation et la synthétisation des réponses se fait sous forme d’un tableau à double entrée (voir fiches de travail en annexes et montage PowerPoint).

 

2. Pour approfondir :

A) Quelles sont les ressources ?

- 1. Energétiques : hydrocarbures, uranium… mais aussi : la mise en valeur pourrait concerner le potentiel en énergie solaire.

Source principale pour a) et b): Le Sahara, Hérodote

a) Hydrocarbures :
 
Depuis une dizaine d’année regain d’intérêt pour les ressources en hydrocarbures du Sahara : augmentation des cours mondiaux du pétrole (baril à 10$ en 1998, à 147$ 10 ans après ; aujourd’hui entre 70 et 90$). De sorte que les compagnies pétrolières ont pu reprendre les opérations de prospection et notamment en Afrique, dans des bassins peu explorés jusque-là.

Une exploration ancienne : les sociétés pétrolières, notamment françaises, ont commencé à produire dans la partie Nord du Sahara algérien à partir de 1958. Même ancienneté en Lybie et au Nigéria.

Plus récemment,
- le Soudan (dans la région qui est devenue aujourd’hui l’Etat du Sud Soudan) est devenu producteur (1999) : grâce à la China National Petroleum Corporation et à Petronas (Malaisie).
- le Tchad (2003): région du bassin de Doba
- la Mauritanie (2006) : gisement off shore de Chinguetti.

 

Des régions en réserve : découvertes depuis 20 à 30 ans : mettant plus de temps à être en développement du fait de leur enclavement :
- Au Niger : un important potentiel dans la région d’Agadem, explorées par les sociétés Elf, Exxon, et Petronas. Mais elles ont quitté le pays : des cours du pétrole trop bas ne permettant pas de rentabiliser un oléoduc de plus de 1500 km pour rejoindre l’Océan.
Relance depuis 2008 avec l’arrivée d’entreprises chinoises qui réalisent la construction, le financement et les opérations d’exploration. Les prochaines phases devraient permettre de produire 80.000 bpj, dont une grande partie serait exportée en brut par pipeline, vraisemblablement vers le Tchad. Les conditions d'interventions des sociétés chinoises restent très obscures et soulèvent des interrogations de la part du FMI. (NB : Avec un PNB par habitant d’environ 275 EUR et plus de 60% de la population vivant avec moins de 1 USD / jour, le Niger figure parmi les pays les plus pauvres du monde: l'indice de développement humain du PNUD 2011 le classe au 186ème sur 187)
 
- Au Tchad (le problème par rapport à l’intitulé de la question est que les gisements principaux sont à la limite de l’espace saharien): une fois extrait, le pétrole circule par un oléoduc Tchad-Cameroun, long de 1.050 kilomètres, qui relie les champs pétrolifères de Doba, dans le sud-ouest tchadien, au terminal maritime camerounais de Kribi. Cet ouvrage est exploité par un consortium pétrolier composé d'ExxonMobil (Esso), Chevron et Petronas. : .

 

b) L’uranium :
Les principaux gisements se trouvent au Niger.
Une campagne de prospection au début des années 50 menée par le BRGM et le CEA décela des indices de présence d’uranium au Niger, à l’ouest du massif de l’Aïr. La décision d’exploiter fut prise en 1967, pour le gisement d’Arlit. Ce pari audacieux d’installer une industrie minière dans un environnement désertique et enclavé fut gagné puisque le Niger est devenu un des premiers pays exportateurs de « yellow cake » (concentré d’uranium). En 2008 il est le 4ème pays producteur avec 8.7% de la production mondiale (derrière La Canada, l’Australie et le Kazakhstan).

 

c) Des énergies renouvelables
Le Sahara dispose d’un degré d’ensoleillement exceptionnel dont on commence à envisager l’exploitation.
En effet la demande en énergie dans les pays du Sud de la Méditerranée pourrait doubler d’ici 2020. Leur préoccupation de satisfaire cette demande  rejoint celles des pays de l’UE qui est de diversifier les sources d’approvisionnement pour renforcer la sécurité énergétique, tout en favorisant le développement des énergies renouvelables.
 
Ainsi dans le cadre de l’Union Pour la Méditerranée (UPM), un Plan Solaire Méditerranée (surtout porté par l’Allemagne et la France) a vu le jour en juillet 2008. Il vise à accroître sur la rive sud de la Méditerranée « la production d’énergies renouvelables, solaires et éoliennes, à développer leur utilisation locale, mais aussi à approvisionner la rive nord de la Mare Nostrum. En effet, selon le Plan Solaire, des capacités de production électrique « verte » seront installées dans les pays du pourtour méditerranéen avec pour objectif une puissance totale de 20 Gigawatt à l’horizon 2020, dont 5 GW destinés à être exportés vers l’Europe ».

 

Ce projet engagera des investissements colossaux, car il faut non seulement construire les centrales, mais aussi des infrastructures transméditerranéennes d’acheminement de l’électricité.

http://www.europolitique.info/politiques-sectorielles/energies-renouvelables-coop-ration-euro-m-diterran-enne-une-strat-gie-partag-e-des-avanc-es-mesur-es-art318993-13.html

http://www.medgrid-psm.com/le-projet/le-projet-en-video/

http://videos.tf1.fr/jt-we/fermes-solaires-la-solution-anti-crise-de-l-energie-6846477.html

 

- 2. Autres ressources : minérales : minerais (or, phosphates) ; de l’eau : présence de nappes profondes, fossiles le plus souvent : déjà exploitées (Algérie, Lybie notamment)

 

- les phosphates :
Les phosphates sont utilisés dans de nombreuses industries, lessives, peintures mais surtout pour la fabrication d’engrais (85% de la production).
Le sous-sol du Maroc renferme plus des 3/4 des réserves mondiales et le Maroc est le premier exportateur dans le monde : 1/3 du total mondial.
 
Les phosphates sont devenus une ressource stratégique : dans le cadre d’une agriculture productiviste, les besoins en fertilisants ont explosé. Sachant que les besoins alimentaires liés à la croissance démographique vont aussi très fortement augmenter, la demande en phosphates devrait progresser rapidement. Or, contrairement au pétrole, que l’on sait remplacer par d’autres énergies, le phosphate n’a pas de substitut.
 
Mais aussi, ils peuvent devenir aussi source d’énergie depuis que l’on sait extraire de l’uranium à partir de dérivés du phosphate. L’Agence Internationale de l'Energie Atomique estime que les phosphates marocains recèlent près de 7 millions de tonnes d'uranium.

 

- L’eau :
Rare en surface mais des réserves très abondantes dans le sous-sol : («  L'aquifère du Sahara septentrional, qui s'étend sur plus de un million de kilomètres carrés sous l'Algérie, la Tunisie et la Libye, recèle environ 31 000 milliards de mètres cubes d'eau. À titre de comparaison, la nappe souterraine de l'Albien, qui occupe environ 100 000 kilomètres carrés sous le Bassin de Paris, n'en renferme « que » 425 milliards de mètres cubes », source : « La Recherche »).
Dans le Sahara algérien les nappes profondes (anciens aquifères contenant une eau potable pure vieille de plus de 40 000 ans) sont quasiment la seule ressource en eau dans des régions très peu arrosées. La population saharienne dépend presque entièrement de cette eau souterraine.
Exploitée depuis plus d'un siècle, elle est à l'origine du développement urbain et agricole de la région, en particulier des villes de l'Atlas saharien. Les puits et forages profonds (certains descendent à plus de 1 000 mètres) se sont multipliés au cours des trente dernières années. On en compte près de 10 000 ! Chaque année, plus de 2,5 milliards de mètres cubes d'eau sont ainsi ponctionnés - contre seulement 600 millions de mètres cubes en 1970 - pour alimenter les villes et villages en eau potable et, surtout, les périmètres d'irrigation. La question de la pérennité de l'aquifère se pose donc avec une acuité croissante à mesure que la demande augmente
(la recharge par les eaux de pluie et de ruissellement est beaucoup plus faible que les prélèvements, qui pourraient épuiser la ressource d’ici 50 à 100 ans au rythme actuel des prélèvements pour le réservoir septentrional du Sahara).
Déjà des signes : le niveau des nappes a baissé de 25 à 50m dans certains secteurs ce qui tarit des sources dans les oasis traditionnelles. En même temps on observe une dégradation de la qualité des eaux, dont la concentration en sel augmente, de même que celle des terres qui sont irriguées.
« Autant d'impacts qui aggravent la désertification, et la pauvreté des populations locales ».

 

Lybie : La Grande Rivière Artificielle.
Au milieu des années 50, la recherche du pétrole dans le désert dans la partie Sud du pays a révélé l'existence d’une nappe d'eau fossile.
 
Pour amener cette eau ancienne à la surface et la distribuer à la population (des villes du nord en particulier), le gouvernement libyen a lancé en 1984 le projet de la Grande rivière artificielle, projet d'une envergure énorme, financé par les revenus du pétrole
Il s'agit d'un réseau de canalisations (4000 km de tuyaux d'un diamètre de 4 m) et réservoirs amenant l'eau des nappes souterraines du désert à la région côtière surpeuplée, pour un coût total estimé à 20 milliards de dollars US.
Une centaine de puits puisent l'eau entre 400 et 800 m de profondeur. Les conduites de béton acheminent 2,5 milliards de mètres cubes d'eau par an. Outre l'alimentation en eau des villes, La Grande Rivière permet l'irrigation de 250 000 hectares dans les régions de Benghazi et de Syrte.
Le projet est censé durer 50 ans, mais sa durée actuelle dépendra du rythme de pompage. En fait, personne ne sait combien d'eau les nappes phréatiques contiennent encore. .
Mais la Libye puise également dans des nappes souterraines fossiles situées à certaines de ses frontières, s'approvisionnant ainsi dans les réserves aquifères des pays voisins (Algérie, Niger, Tchad et Égypte).
D'où un risque important d'abaissement du Fezzan et du Nil ainsi que de leurs nappes aquifères que pourraient engendrer des pompages excessifs.

 

- autres ressources : minerais variés : or : Mali 3ème producteur africain ; fer : Mauritanie, Algérie…

 

NB : n’ont été développées que les ressources essentielles, et qui sont aux centre d’enjeux majeurs.

 

 

B) Une mise en valeur difficile :

- 1. Facteurs naturels: milieu naturel difficile ; enclavement

La maîtrise, l’exploitation de ce territoire immense est difficile.

a) Un climat hyperaride :
Le climat du Sahara, chaud, ensoleillé et aride, est caractéristique de celui d'un désert chaud, situé de part et d'autre d'un tropique.
Les températures diurnes sont très élevées, pouvant dépasser 50°C, et l'amplitude thermique entre le jour et la nuit est souvent supérieure à 35 ou 40°C.
Les précipitations sont très rares et irrégulières; la plupart des régions reçoivent en moyenne moins de 130mm de pluie par an, et certaines, comme le Tanezrouft ou le désert Libyque, restent plusieurs années sans pluie. Les pluies peuvent survenir sous la forme d'averses très brutales, et l'eau ruisselle dans les oueds. En Égypte, la haute vallée du Nil ne reçoit que quelques jours de pluie par an. Les précipitations augmentent dans les massifs montagneux du Hoggar et du Tibesti, et en marge du désert, surtout sous la forme d'averses estivales.
Des vents, brûlants comme le sirocco, ou plus frais, comme l'harmattan, soufflent régulièrement.

 

b) L’enclavement

Les distances à parcourir sont souvent énormes et les moyens de transports limités.

L’évacuation du « yellow cake » d’Arlit se fait par camion, puis en bateau par le port de Cotonou, à une distance de 2000 km.

« Quant au transport d’uranate d’Arlit à Cotonou, il est souvent fait dans des conditions déplorables, sans respecter les règles internationales sur le transport des matières dangereuses, voire mortelles.
Les chauffeurs transportant ces produits n’ont reçu aucune sensibilisation, et n’ont aucune protection. De même que les forces de sécurités escortant les camions.
Il arrive même que des passagers soient acceptés et voyagent sur les fûts d’uranate, les denrées alimentaires sont transportées sur les mêmes fûts, le long de la route d’Uranium qui traverse village et grandes villes du pays.
En cas d’accident, les populations environnantes sont totalement exposées au danger ». Le Président de l’ONG Aghirin’Man.
 
 
- Pour les hydrocarbures extraits dans des zones enclavées il est nécessaire de construire des oléoducs de plusieurs centaines de km : pétrole du Niger, du Tchad ou du bassin de Taoudenni mauritanien. Cela nuit à la rentabilité de l’exploitation en raison du coût des infrastructures. Une façon de réduire ce coût est une coopération régionale.

 

 

- 2. Facteurs humains, économiques : faiblesse de l’occupation humaine, pauvreté et faiblesse des Etats : manque de moyens financiers et techniques ; des territoires mal maitrisés

a) Faiblesse de l’occupation humaine :
Bien qu'aussi étendu que les États-Unis, le Sahara (sans la vallée du Nil) a une population estimée à 2,5 millions d'habitants seulement, soit une densité inférieure à 0,4 habitant par kilomètre carré. De vastes zones sont complètement vides.
Le peuplement est principalement constitué des nomades islamisés, Maures et Touaregs. Ces derniers, les plus nombreux, regroupés dans les régions montagneuses du Hoggar, du tassili des Ajjer et de l'Aïr, revendiquent aujourd'hui leur indépendance face aux gouvernements du Mali (voir plus haut…), de l'Algérie et du Niger.
Les principaux points de peuplement du désert sont des oasis : Ghardaïa, Tamanrasset et Souf en Algérie, Sebah, Ghadamès et Mourzouk dans le Fezzan, Koufra en Libye, Kattara et Baharieh en Égypte.
 
La faiblesse du peuplement s’explique par l’enclavement géographique, les conditions climatiques et les difficultés pour développer des activités économiques, de l’emploi en dehors des activités traditionnelles (élevage transhumant, une petite agriculture vivrière de type oasis) et , si la situation sécuritaire le permet, un peu de tourisme. L’extraction des richesses du sous-sol, activité fortement mécanisée, ne crée pas beaucoup d’emplois au regard des besoins et l’impact économique se mesure principalement en termes de recettes pour le budget de l’État et de devises gagnées à l’exportation : les populations, notamment Touaregs au Mali et au Niger profitent peu de cette rente. 
 
Néanmoins il ne faut pas ignorer que le Sahara est aussi un monde de villes. Les anciennes citées héritées des échanges transsahariens ont dès la période coloniale amorcé un déclin mais d'autres types de villes ont émergé à la faveur des indépendances dans les années 1960, grâce à des politiques volontaristes d’aménagement des nouveaux Etats.
Certaines de ces villes nouvelles sont directement liées à la mise en valeur de richesses du sous-sol (pétrolières ou minières) : Zouerate pour le fer en Mauritanie, Arlit pour l’uranium au Niger, Hassi-Messaoud pour le pétrole, Hassi-R’mel pour le gaz en Algérie.
D’autres sont voulues comme villes de commandement territorial, conçues pour organiser un territoire donné, y représenter les services de l’Etat. Nouakchott  en Mauritanie par exemple.
Toutes ces villes ont connu une croissance beaucoup plus rapide qu’il n’était prévu : démographie saharienne, effet de la sècheresse, sédentarisation des nomades, impact des bouleversements économiques… : Arlit conçue pour accueillir au maximum 18.000 hab. en compte 120.000. Elles sont aussi devenues des villes de transit pour les candidats à l’émigration vers l’Europe.

 

b) Faiblesse et pauvreté des Etats :
On peut ici distinguer deux catégories d’Etats :
- au nord, des Etats riverains de la Méditerranée, qui ont amorcé un décollage économique, ont une certaine maîtrise de leurs ressources et les mettent en valeur : Algérie, Maroc, Lybie, Tunisie. « Les territoires sahariens (y) constituent des arrières pays en voie d’intégration ».
 
- La situation est différente dans les Etats du Sud du Sahara, dans la bande sahélienne. Les autorités gouvernementales ont du mal à contrôler ces territoires désertiques, l’appareil de l’Etat y est parfois absent ou cantonné à quelques bourgades. (Niger, Mali notamment).
Plusieurs Etats n’ont pas les moyens financiers de mener eux-mêmes des campagnes de prospection. Le Mali, la Mauritanie par exemples sont tributaires des sociétés privées ou nationales occidentales, qui elles-mêmes ont besoin d’un prix du baril élevé pour entreprendre et persévérer dans leurs recherches : un premier échec de Total dans le bassin de Taoudenni en Mauritanie a refroidi les sociétés pétrolières au Mali voisin.

 

C) La course aux ressources naturelles :

Où ? Qui ? Anciennes et nouvelles puissances

 

- La France, ancienne puissance coloniale… avec ses firmes Total, AREVA … .
Longtemps seule au Niger, pour extraire l’uranium, la France doit aujourd'hui faire face à une sérieuse concurrence. Au cours des dernières années, le Gouvernement du Niger a accordé de nombreux permis d'exploitation à des sociétés canadiennes, chinoises, australiennes, russes, indiennes, sud-africaines… provoquant ainsi une « rupture » avec les pratiques antérieures et incitant la France à mieux assurer son approvisionnement en uranium dans ce pays.
 
- Pays émergents : Chine (Uranium du Niger, pétrole soudanais et tchadien) diplomatie et cadeaux, mais un appétit féroce…
 
Brésil (fer mauritanien), Inde (fer ….)…
Les Etats-Unis…

 

Remarques et conclusion.

- Dans cette proposition de séquence ne sont pas traitées les migrations de populations. Les villes du Sahara sont devenues des villes de transit pour des populations subsahariennes qui tentent de rentrer dans l’UE. Ces déplacements de populations alimentent tout un circuit économique. La migration par étapes, de ville en ville, devient un scénario fréquent pour des migrants africains. Mais le nombre de migrants africains qui accostent en Europe demeure infime en dépit d’une forte médiatisation des naufrages et arrestations au cours des dernières années.
Quelle place accorder à ce phénomène par rapport à l’intitulé de la question ?
 
- Un article récent du Monde, daté du 19.01.2011 apporte aussi un éclairage intéressant sur l’espace saharien. 
L’auteur en est Ali Bensaâd est enseignant-chercheur à l'Institut de recherches et d'études sur le monde arabe et musulman et au Centre Jacques Berques.
Il souligne le fait que le Sahara n’est pas un espace vide « à conquérir ». Il relativise aussi l’implantation d’AQMI qui doit compter avec l’existence de populations organisées, qui connaissent le terrain, ont tissé des solidarités et des liens forts.
« Il est pour le moins paradoxal, et révélateur, qu'ait pu s'opérer une mystification sur une prétendue opacité de cet espace alors qu'il est l'un des mieux contrôlés. Pas, il est vrai, par les Etats nationaux pour lesquels il reste un espace gris et d'irrédentisme mais plutôt par les populations locales qui le pratiquent intensément par leur mobilité, même si celle-ci a changé de forme. C'est l'occultation de ces populations qui voile le regard sur cet espace et le plonge dans une apparente obscurité. C'est pourtant l'espace dont la structuration spatiale, assise sur un substrat social ancestral, est bien balisée » (…).

Au-delà de la question tragique du terrorisme, cette situation rappelle avec force que le Sahara que Braudel désignait comme "l'autre Méditerranée" est un élément essentiel de son système et qu'il le demeure malgré l'épisode colonial qui a voulu en faire un monde-frontière et les Etats-nations un appendice territorial à seul usage stratégique. Elle rappelle que la mondialisation ne saurait être unilatérale ou univoque, les marges étant là pour la subvertir et la ramener aux réalités du monde ».

Le Monde.fr | 19.01.2011 à 09h19

http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/01/19/la-region-saharo-sahelienne-est-controlee-par-les-populations-locales_1467080_3232.html

 

Bibliographie :
- Revue Hérodote : « Géopolitique du Sahara », n°142, 3ème trimestre 2011  (ouvrage de base)
- L’Afrique dans la mondialisation, Sylvie Brunel, dossier n° 8048, 2005 La Documentation Photographique, et L'Afrique, un Continent en réserve de développement, Sylvie Brunel, Bréal, 2010.
- Qui sont les maîtres du Sahara ? , Annette Lohmann, juin 2011, Friedrich-Ebert-Stiftung
- Différents articles de presse dont les références sont citées
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